A coté de la carte de la Belgique, un grand tableau était accroché au mur, avec une représentation de paquebot. « Den Belgenland », noir comme le charbon avec ses 3 cheminées qui fumaient. On aurait dit un poêle avec 3 tubes qui crachaient une épaisse fumée simultanément. Il avait comme décor en arrière-plan, son port d’ Anvers, l’Escaut de 500 m de large et la tour de la cathédrale... floue. J'ai passé beaucoup de temps dans cette classe où je me suis tué à observer ce tableau qui m'intriguait. Ce tableau m' a ensorcelé et occupait toutes mes pensées, ce qui m'a couté beaucoup de punitions: « Je serai attentif pendant le cours », mais cette punition devait se faire à la maison et signée par mon père afin d’être remise le lendemain à l'instituteur. Mes parents me disaient que le maître avait sûrement raison .C'est toujours pareil et c'est comme ça que j’en ai déduit que les adultes avaient toujours raison et qu'ils jouaient au patron avec les enfants. Mais je suis toujours d'avis que ce tableau a eu une énorme influence sur mon imagination. Je me souviens qu' Einstein avait cité, que l’imagination était plus importante que "LE SAVOIR" et que j'avais raison. En tout cas, ce "fléchisseur de lumière" n’était pas non plus n’importe qui ! En ce temps, je ne le connaissais pas encore et le professeur ne nous en avait jamais parlé. D’ailleurs personne n'aurait su le comprendre car nous n’étions qu'en cinquième primaire.
Une très fine partie de la coque du bateau, juste au dessus de la surface de l’eau, avait été peinte en rouge, probablement pour résister à la rouille causée par l'eau de mer salée. L'eau de l'Escaut était si grisâtre et trouble, légèrement ondulée avec par ci par là, une mousse blanche qui recouvrait les éclaboussures. A l’avant-plan du bateau, il y avait un remorqueur qui par rapport à ce colosse, ressemblait à une coquille de moule dont la cheminée noire se réfléchissait sur l'eau. Curieusement, à l'avant-plan, derrière la balustrade, il y avait des petits groupes de personnes, des passagers ou d'autres objets qui étaient de minuscules taches de couleur dans cet impressionnant ensemble . J’ai du faire cette année scolaire deux fois et la 2ème année, j'étais de nouveau assis sur le même banc. Ce mastodonte avait vraisemblablement compris qu'il n'y avait rien à apprendre pour moi. J'étais devenu la victime de mes rêves et en observant cette toile, je me disais que je deviendrais soit marin, soit artiste. Je devins le dernier... Je suis convaincu que cette histoire a été déterminante dans le choix de ma carrière.
Avec cette démarche, je m'égare peut-être trop de mon sujet, mais je trouve que ce n'est pas négligeable dans tout ce qui est emballé par « ce chinois de l’arithmétique » (les années précédentes, nous avions eu des notions sur les additions et soustractions mais cette partie devenait trop compliquée . Il appelait ça le système métrique. Quelque chose avec des fractions et des morceaux. Je pensais immédiatement à quelque chose de médical avec un bandage, un peu comme sur une posture miniature dans la vitrine d’un pharmacien. Aussi loin que je puisse m’en souvenir, je n’ai plus jamais vu un tel étalage.
J'avais cela en moi et je me sentais de plus en plus sûr jour après jour. Une ligne est plus forte, plus puissante qu'un mot, même un enfant peut comprendre ça, mais l'obligation gagne à nouveau sur ce désir et confirme qu'un être humain doit pouvoir faire plein de choses afin de vivre une vie normale. « L'ART": ce mot a de plus en plus de racines dans mon esprit ... Pourquoi tant de statues d'artistes et de musées ont-ils été construits?
Rembrandt-Michelangelo-Rubens, ça c'était tout à fait différent que 1 et 1 font 2. Et il est donc normal que nos chemins se séparent. Ici le «dresseur» dans son cirque, et moi dans la ville voisine d'Anvers, serrant la main de mon père, avec un cœur pétillant et un short ... marchant de la gare vers les académies qui passent par le Groenplaats où Rubens entendait les sons du carillon de la Tour de la cathédrale de Notre-Damme. Ici je restais regarder les gens en créant mon alphabet. C'est ici que j'ai pris terre, fini les pots de fleurs sur les appuis de fenêtre. Ici le «dresseur» était vite oublié. L'académie, j’en vois la porte d'entrée qui donne accès à la cour intérieure avec des pavés et la statue de David Teniers sous les arbres (merci David d’avoir fait une telle école !)
Les gendarmes roulaient encore à vélo (en bleu foncé avec haut kepi et bord laqué) en se suivant sérieusement. Une silhouette pâle devant avec des rayures sur les manches et dans le dos, un adjoint rougissant qui pédalait avec une vitesse soutenue, rarement salués par les passants ils continuaient leur tournée ... Le bourgmestre se rendait également à la maison communale à vélo, je l'ai vu des dizaines de fois, parce qu'il habitait près de notre maison.Il trottinait 2,3 fois avec son pied gauche sur l'axe de la pédale, tenant son guidon serré avec ses deux mains et puis hop avec son pet en selle il avançait (très lentement ..))
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